Emmanuel Combe a publié une chronique dans le journal L’Opinion, le 18 Août 2015 sur une commande d’Airbus par la compagnie indienne low cost Indigo.
Des Airbus en Inde pour Indigo : tout un symbole !
L’annonce de la vente de 250 A320 Néo à la compagnie indienne Indigo mérite que l’on s’y arrête : au-delà des 24 milliards d’euros engrangés par Airbus, cette annonce est symptomatique des gains que la France pourrait retirer d’une insertion réussie dans la mondialisation.
Premier enseignement : si l’aéronautique constitue le premier point fort de notre commerce extérieur, ce n’est pas un hasard. C’est parce que nous avons fait depuis 40 ans le choix de l’excellence technologique. Au-delà de l’aéronautique et de la technologie, force est de constater que chaque fois que la France a misé sur l’excellence, elle en est sortie gagnante. Que ce soit l’excellence de la main, de la qualité de fabrication, de la créativité, de la réputation avec l’industrie du luxe ; ou que ce soit l’excellence des traditions et des savoir-faire avec les « produits du terroir » comme les fromages ou les spiritueux. Bref, plus que jamais, nous devons faire dans toutes nos productions, y compris les plus confidentielles, le choix de la compétitivité par le haut, de la qualité et de la montée en gamme.
Miser sur l’Asie.
Deuxième enseignement : si nous voulons une croissance plus forte en France, nous devons aller la chercher là où elle se trouve, c’est-à-dire à l’exportation. Après la vente de 234 appareils à la compagnie indonésienne Lion Air, ce n’est pas un hasard si Airbus vient de conclure un contrat avec une compagnie indienne.
L’Asie connaît un taux de croissance de l’ordre de 5 %, qui atteint même les 7 % dans le cas de l’Inde ; 5 % par an, cela signifie tout simplement que la richesse du continent asiatique doublera en l’espace de 14 ans, conduisant ainsi au développement d’une large classe moyenne et de son corollaire : la consommation de masse. Mais pour tirer parti de cette manne, encore faudrait-il que nous tournions le dos à la doctrine du bouc émissaire qui nous fait parfois pointer du doigt « la concurrence déloyale des pays à bas coût », aux discours politiques du repli sur soi, déguisés aujourd’hui sous le doux vocable de « protectionnisme intelligent ». Si nous voulons exporter vers la Chine, le Brésil ou l’Inde, ne nous leurrons pas : nous devons accepter en retour d’ouvrir aussi notre économie à leurs produits et de renoncer à certaines productions, notamment à faible valeur ajoutée. Le commerce international marche dans les deux sens et il serait illusoire de penser que nous pourrions nous protéger sans craindre un sévère retour de bâton à l’exportation.
Notre objectif ne doit pas être d’importer moins de téléphones portables, de produits textiles ou d’ordinateurs d’Asie pour les produire nous-mêmes, mais d’exporter beaucoup plus d’avions et de produits à forte valeur ajoutée vers l’Asie et le reste du monde.
Dernier enseignement : le contrat d’Airbus a été conclu avec la compagnie Indigo, une low-cost née il y a moins de dix ans mais devenue le premier opérateur sur le marché indien. Partout dans le monde, le trafic sur le moyen-courrier est tiré par les low-cost. Au-delà de l’aérien, ce sont bien les nouveaux modèles économiques qui viennent dynamiser la productivité, facteur clé de la croissance. Plutôt que de refuser l’évidence, et de nous abriter derrière de fragiles digues, emparons-nous de la nouveauté, fût-elle disruptive, et accompagnons-la pour la transformer en opportunité de création de richesses !