« Ventes immobilières : haro sur le Hoguet ! » (L’Opinion)

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Emmanuel Combe a publié le 12 Juin 2023 une chronique dans L’Opinion.

Ventes immobilières : haro sur le Hoguet !

 

A l’heure de la remontée des taux d’intérêt, l’accès à la propriété est devenu un sujet d’inquiétude majeur pour de nombreux Français. C’est dans ce contexte critique que l’Autorité de la concurrence vient de rendre un avis particulièrement audacieux sur le marché des agents immobiliers.

Commençons par expliquer la fonction de l’intermédiation immobilière : elle permet de réduire l’asymétrie d’information fondamentale qui existe entre vendeurs et acheteurs. Il est, en effet, difficile pour un acheteur d’apprécier la qualité d’un appartement avant l’achat ; il va donc intégrer ce facteur de risque en proposant un prix bas ou renoncer à la transaction. De son côté, le vendeur qui détient un bien immobilier de qualité va avoir du mal à en convaincre l’acheteur et préfèrera le retirer du marché. Sans intermédiation, on risque de se retrouver dans une situation inefficace : un faible nombre de transactions à bas prix sur des biens immobiliers de mauvaise qualité. Les mauvais appartements auront chassé les bons ! Pour éviter cet écueil, l’intermédiaire immobilier vient s’interposer entre l’acheteur et le vendeur, en garantissant la qualité de la transaction. En France, son statut est aujourd’hui réglementé par la loi Hoguet qui date de… 1970.

« Si nous étions dans la moyenne européenne, les Français pourraient récupérer environ trois milliards d’euros »

 

Libéralisation. Mais, depuis cette date, le monde a fortement changé, notamment avec l’arrivée du numérique. Tout d’abord, l’acheteur potentiel dispose désormais d’outils de recherche sur internet qui lui permettent de se renseigner sur la qualité d’un bien. Aujourd’hui, 30 % des transactions se font directement entre particuliers, sans intermédiaire. Ensuite, l’intermédiation immobilière s’est diversifiée et ne se résume plus aux seules agences physiques : à la faveur de la révolution numérique, de nouveaux acteurs se sont développés, et en particulier les réseaux de mandataires.

L’Autorité constate que ces derniers mobilisent sur le terrain des personnes qui ne remplissent pas les conditions d’accès à la profession, sans que cela n’ait entraîné de dysfonctionnements. Plus fondamentalement, l’Autorité de la concurrence constate que la loi Hoguet ne règle pas tous les problèmes d’asymétrie d’information. En particulier, il n’est pas certain que l’intermédiaire immobilier défende toujours au mieux les intérêts de l’acheteur : dans la mesure où il est payé exclusivement au résultat, son objectif peut être de conclure la vente. De même, le client n’est pas toujours informé du contenu exact de la prestation délivrée par l’intermédiaire immobilier et des honoraires correspondants.

Bref, la loi Hoguet a fait son temps. Plutôt que d’appeler à son renforcement, l’Autorité fait le pari d’une libéralisation, avec deux options possibles. Une première option est celle de la liberté d’exercice en matière de vente immobilière, sur le modèle hollandais ou espagnol. Exit la loi Hoguet. Une seconde option consiste à assouplir et harmoniser les conditions d’exercice de la profession, tout en renforçant l’information des clients. Dans les deux cas, l’objectif ultime est d’améliorer la qualité de service et de faire baisser les commissions. Avec, à la clé, un gain substantiel de pouvoir d’achat : avec un taux moyen de commission de 5,78 % du prix de vente, nous sommes les champions d’Europe. Si nous étions dans la moyenne européenne, les Français pourraient récupérer environ trois milliards d’euros. Pas négligeable en ces temps d’inquiétude sur le pouvoir d’achat.

 

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